Théo, Zoé, Léo et les autres…

15 octobre 1914

15 octobre

Jai reçu hier soir ta lettre du 28 septembre par laquelle tu m’annonces que tu as reçu mes lettres écrites d’Amiens et en cours de route.  Les autres sont sans doute entre tes mains depuis. Tu me dis aussi que tu as reçu la feuille rose, je suis tranquillisé. Je le serai encore plus quand tu m’auras dit que tu as reçu mon bon du trésor. As-tu reçu aussi le reliquat de mes appointements de l’asile ? J’écrirai au Directeur un de ces jours.

Ne te tracasse pas ma chérie au sujet des dangers, il y en a moins ici, pour moi, que devant Nancy. Je crois remarquer de la lassitude dans le tir de l’artillerie allemande. Dans tous les cas, j’attribue au front immense qu’ils sont obligés d’arroser le peu de projectiles que nous recevons. Puis je pense qu’ils se figurent que leurs prisonniers et blessés sont encore au village où je suis et que c’est pour cela qu’ils ne bombardent pas.

Tu me dis toujours pas si Eugénie est avec toi ? As-tu reçu la lettre dans laquelle je te recommandais de profiter de sa présence pour te faire belle.

Pauvre Bourgeois ! Il sera dit que tout le monde sera touché par cette guerre. Oh ! quel beau jour sera celui où nous pourrons faire enfin sentir notre volonté à ces êtres maudits. Mais que le courage est rare dans notre pauvre pays. Quel égoïsme, et à quelles lâchetés ce défaut conduit !! Je reste néanmoins convaincu du succès qui sera dû à l’usure, moi qui aurais tant voulu le voir imposé par notre force… Enfin qu’importent les moyens. Pourvu qu’on se dépêche et que notre rencontre en soit hâtée.

Mille baisers, ma chérie, je t’écrirai dans trois jours

Ton tout à toi

J.Druesne

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15 octobre 1914 (JMO du 37e RI)

Stationnement dans les mêmes conditions que la veille. Un bataillon du 153e est allé dans la nuit du 14 au 15 relever le Bataillon du 37e (1e) qui était encore à Hébuterne. Le 1er bataillon vient à la sortie Nord Ouest d’Hébuterne en réserve.

Cartographie du 15 octobre 1914

1 réflexion sur “15 octobre 1914”

  1. Ce sont des lettres qui sont parvenues à leur destinataire, c’est à dire des lettres qui ont franchi la censure militaire. Aujourd’hui, on dirait des lettres « soft ». La vérité est tout autre. Il y avait deux dangers : l’ennemi (ça c’est normal) et la prévôté (gendarmerie contrôlant les troupes). C’est ce qui s’appelle tomber de Charybde en Scylla. Je ne me base pas sur des lettres, mais sur des récits de mon grand-père. Dans ses lettres à ma grand-mère, il a toujours minimisé la situation. Il ne pouvait pas décemment lui écrire, de Salonique, qu’il avait embroché un Bulgare à la baïonnette…

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