Sivry, dimanche 9 août 1914
Ma bonne Cécile,
Le régiment continue à être d’avant garde et procède à des travaux de défense des hauteurs regardant la frontière. N’étant pas occupé à ces travaux, je reste au village ou l’attente est plutôt fastidieuse.
Les nouvelles continuent à être bonnes, l’entrain est le même. Un lieutenant de hussards me disait même qu’il était ennuyé parce qu’il ne pouvait retenir ses hommes. L’Est a relaté l’histoire invraisemblable de celui ayant été fait prisonnier a pu se sauver en civil et voler le cheval d’un Uhlan qu’il tua, on le nomma brigadier. Tout à l’heure, ses camarades sont entrés sans lui et avec son cheval et une lance de uhlan, mais ayant été poursuivis par une troupe plus forte, ils ont perdu leur brigadier d’une façon que je ne comprends pas.
Ces détails, tu le vois, sont sans grande importance, néanmoins j’éprouve une douce émotion en te les narrant. Ta lettre précédente sous mes yeux, il me semble que je m’entretiens auprès de toi. Malheureusement, j’ai laissé avec des paperasses soit dans la table de nuit, soit dans la poche d’un de mes vestons, quelques photographies de vous et de mémère que je portais toujours dans mon portefeuille. J’ai aussi oublié ma brosse à dents. Puisque la poste reçoit gratuitement 20 grammes, tu pourrais peut-être essayer de me l’envoyer.
Au moment de fermer ma lettre, je reçois la tienne datée du 8. Je m’empresse de t’envoyer la procuration, mais il ne faudra la remettre que si on te la demande, car cela aurait peut-être l’air d’être la carte forcée. Je redirais même qu’il serait de bonne politique d’avoir l’air de demander conseil et de donner cette procuration… Par hasard…
J’ai lu et relu le mot de Robert, cela m’a beaucoup intéressé.
Je reçois tes lettres régulièrement, je m’étonne que tu n’aies pas reçu les miennes, car tant que je le pourrai, je t’écrirai chaque jour. Je crois, que nous serons encore ici demain 10 et peut-être après-demain. Je t’embrasse bien fort ainsi que Loulou et vais trouver un moyen de faire déposer à Nancy quelques bibelots qui m’embarrassent. (1)
J.Druesne
(1) je te dirai où quand je serai fixé.
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9 août 1914 (JMO du 37e RI)
L’occupation de la position et la surveillance sont ainsi organisés le 9 août à partir de la relève.
1° Grande Garde n°1 (5e et 6e) sous les ordres du capitaine Serot au Mont St Jean (cote 407) Juribois, Jeandelaincourt, Mt St Jean (cote 407 et 400)
2° Grande Garde n°2 Mont Toulon 7e Cie
3° Grnde Garde n° 3 (Serrières 8e Cie
Le 1er bataillon rentre au cantonnement de Sivry à la disposition du Gal Commandant la 22e Brigade. Le 3e Bataillon continue à être maintenu à Eulmont à la disposition du Gal de Division