Théo, Zoé, Léo et les autres…

Madeleine: la famille s’agrandit (1931-1936)

4enfantsLa vie coulait facile à Thourotte. Maurice allait au bureau ; j’étais bien servie par une petite bonne qui n’avait, – dans ce temps-là, – de sortie que le dimanche après-midi ! Le jardinier prenait grand soin du jardin. Nous avions des arbres fruitiers : pruniers, cerisiers et j’appris avec beaucoup d’intérêt à faire des confitures. Maurice cueillait les fruits avec les enfants au pied de l’arbre pour l’aider, ce qu’il faisait avec joie, et on venait m’apporter en procession le panier plein de fruits : « A toi de travailler maintenant ! » Dans ma grande bassine en cuivre, j’ai fait des centaines de kilos de confiture. Puis il y avait les conserves de haricots, les bocaux stérilisés de petits pois, les oeufs mis en conserve, eux aussi, dans du papier journal ! Car j’avais des poules. L’hôtelière m’avait prêté une poule couveuse et dans une cage à lapin je l’avais mise sur huit œufs. J’étais en admiration, car elle couvait sans jamais bouger… Et un matin, je l’ai trouvée morte… desséchée sous ses plumes ! C’est ainsi que j’ai appris qu’il fallait sortir la poule tous les soirs pour qu’elle mange, boive et fasse ses besoins. J’avais compris et pendant 15 ans, je faisais des couvées tous les ans. Une année une grosse poule m’a fait 13 poussins avec ses 13 œufs. Je n’étais pas peu fière ! Et puis les cages à lapins ne pouvaient pas rester vides. Il y eut des lapins et des « portées » après la mise au mâle de la femelle ! C’était passionnant d’apprendre tout cela, moi l’ancienne « Sorbonarde » qui essayait de garder un peu de sa « belle intellectualité » en lisant… quand j’en avais le temps !
Car un vice s’était développé en moi : l’amour des cartes. Je n’avais jamais touché un jeu de cartes avant de me marier : Maurice, dans les tranchées, avait beaucoup joué au bridge. Et c’est ainsi qu’à Compiègne où Maurice avait fait de sympathiques connaissances en allant aux « Officiers de Réserve », nous étions souvent invités et passions des soirées à jouer au bridge après un bon dîner, parfois jusqu’à 2h du matin. Les enfants étaient aux soins de la bonne, mais je crois qu’ils nous voyaient partir le cœur un peu gros…
En 1932, je me trouvai enceinte à nouveau : nous en étions tous deux très heureux. Mes parents avaient toujours leur maison à Onival et avant la naissance, c’est à dire en juillet, ils prirent Monique et Alain pendant un mois. Le bon air de la mer leur fit beaucoup de bien, surtout qu’au printemps « le Si beau » « le Tom » avait eu un gros ennui. Sa sœur avait la rougeole et quand elle se déclara chez lui, le médecin, ne l’ausculta pas. Sinon il aurait remarqué que les vertèbres de sa poitrine s’affaissaient et si je ne m’en étais pas aperçue, il aurait pu devenir un petit bossu ! Le Docteur Léonard prit la chose très au sérieux. Stérogyl, huile de foie de morue, etc. ; mais le plus remarquable fut la patience et la persévérance du « Père Poule » qui, en rentrant du bureau, tous les jours, sans en manquer un seul, faisait souffler à son fils, 50 fois, une bougie… et ceci pendant des mois. Et petit à petit, la poitrine du fils reprit sa forme et avec tous les médicaments, il devint un solide gaillard !
Revenons à Onival. Ma mère qui n’avait pas eu de garçon se prit d’un grand amour pour son premier petit-fils qui le lui rendait bien ! Ils allaient tous les jours à la plage et jouaient dans le sable comme moi autrefois.
Le 3 août 1932 naissait un autre fils François. Pour le premier je désirais : Christian et mon mari François, en souvenir de son grand-père qui l’avait tant marqué ! Nous transigeâmes en : Alain. Pour le second, je ne me sentis pas le courage de priver mon mari d’avoir un François ; et j’en suis récompensée, car ce François, a toujours été heureux d’avoir le nom de son arrière grand-père, sur la tombe duquel il va tous les ans à Montigny-sur-l’Ain.
Trois enfants. Je n’en désirais pas plus. Mais dans ce temps-là, il n’y avait pas la pilule et le quatrième s’annonça en 1935. J’avoue que j’étais très contrariée. Mon cher mari me promit un manteau de fourrure si je ne… rouspétais plus !! Marché conclu ! Et le 5 septembre, à 3h du matin, après des heures de douleurs toujours les mêmes !! naissait une jolie petite fille. « Fille aînée pour aider. Fille dernière pour consoler ». Ce qui fut très vrai, car notre Monique a été une seconde mère pour ses deux frères et pour cette sœur qu’elle désirait tant et pour l’arrivée de laquelle elle avait fait brûler un cierge à Onival avec sa grand-mère. Car mes parents une fois de plus avaient pris, dans leur villa, Madeleine les deux aînés, mais pas François, car trois, surtout ce dernier petit diable de trois ans, les auraient trop fatigués ! Il faut voir sur une photo, François, tout triste au bout de mon lit, pendant que Papa photographiait la nouvelle venue qui empêchait ses parents de s’occuper autant de lui ! La jalousie ! Et pour nous punir, il se remit à faire pipi au lit ! Pas longtemps, à cause des fessées ! Et Chantal fut la « Consuelita » de son Père.
Le manteau de fourrure fut du poulain…

6 réflexions sur “Madeleine: la famille s’agrandit (1931-1936)”

  1. Quelle ressemblance étonnante entre Madeleine, Monique et Christine!
    Quelle femme extraordinaire cette Mamita!!!
    qui n’hésite pas à élever poules et lapins , à faire des confitures pour régaler sa maisonnée!
    J’attends impatiemment les souvenirs de 39/40
    Bises d’une fan de ton blog
    Dany

  2. Jean > Merci, si ce blog t’a donné envie de faire partager tes trésors, je suis ravie

    Alain > J’espère que cela t’a plu!

    Ilescook> Je travaille avec des correspondances, des souvenirs (entre autre ceux de ma grand-mère Madeleine…), des archives diverses et je complète par des lectures suivant le sujet de la note.
    Rien d’inventé!
    Pour les années de ta génération… il me faudrait que je sache quelles années…

    Dany > Merci de ta fidélité

    Mona > Merci de ton compliment

  3. Jacqueline Cauquil

    Ce travail de mémoire est très important pour les générations futures. Nous recherchons tous, les souvenirs de nos anciens, quand nous même nous avançons en âge. Ces écrits, sont comme un cri d’amour….
    Bravo Christine

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