Théo, Zoé, Léo et les autres…

17 décembre 1914

17 décembre 1914

Ma chère et bonne Cécile,

Rien de bien nouveau, il nous revient que nos anglais, à droite ont réussi à gagner 7 km. Ils sont ainsi  à notre hauteur et dégagent un peu le pivot que nous formions à Ypres.

A gauche, coté Ostende, je n’entends rien dire.

Je suis heureux de l’endurance des hommes. Je crois qu’il n’est pas possible, en effet, d’infliger supplice plus rigoureux qu’un séjour diurne et nocturne dans l’eau et la boue. Or tout cela est supporté avec courage. C’est merveilleux et je répète 20 fois par jour qu’il est regrettable de n’avoir pas pu tirer meilleur partie au début, d’un pareil élément.

Je vois des gaillards qui n’ont plus de la culotte que ce qu’il faut pour qu’elle tienne les jambes couvertes de la boue jaune de la Belgique, rester 4 ou 5 jours les pieds dans l’eau.

Les prussiens sont dans le même cas, puisqu’ils ne sont qu’à 100 m de nous. Chaque fois qu’un de nos projectiles va dans leurs tranchées, ce qui arrive souvent, on voit jaillir l’eau sur les parapets. On raconte même, mais ce sont sans doute les journalistes qui causent comme toujours, sans avoir vu, qu’on ne s’explique pas comment les prussiens peuvent tenir pareil régime. Et nous alors, sommes nous plus malins qu’eux, nous qui dans ce pays plat avons le même niveau d’eau qu’eux.

Voilà ma chérie la vie. Je comprends la richesse de ce pays en culture, la terre s’assèche assez vite et cependant une couche d’eau séjourne en permanence à quelques décimètres du sol. Oui ma chérie, nous viendrons voir cela, mais je doute que les désastres actuels ne soient de longtemps effacés.

Je n’ai pas reçu de lettres de toi aujourd’hui, en revanche, j’ai reçu un bon mot de Robert, il me dit que tu lui communiques mes lettres, tu fais bien, comme ce serait une redite, je ne lui parlerai que des faits saillants.

Je cesse ma chérie, j’ai un peu sommeil. Comme ma lettre ne partira que tout à l’heure, je l’achèverai d’un mot, cependant en cas d’alerte, je l’arrête ici, quitte à ajouter ce mot après signature.

Je t’embrasse bien fort. Ton tout à toi.

J.Druesne

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17 décembre 1914 (JMO du 37e RI)

Le 1er bataillon rentre à Boesinghe.

Cartographie du 17 décembre 1914

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