T comme la Toile rayée jaune et blanche

Lorsque j’étais enfant, une grande toile rayée jaune et blanche réapparaissait chaque année avec les beaux jours. Généralement, c’était pour un pique-nique …
Dès le matin, Maman s’affairait, préparait le panier, les assiettes, les couverts pendant que papa préparait invariablement du poulet en papillote (dans une feuille d’aluminium: un morceau de poulet cru quelques lardons -indispensables en Lorraine- quelques champignons, des herbes de Provence, sel et poivre) qu’il comptait faire cuire sur un petit barbecue pliable. Tout était chargé dans l’ID, voiture Citroën changée tous les 2 ou 3 ans et qui suivant les époques fut vert « crapaud » (qualification de Mamita, notre grand-mère qui lorsqu’elle nous voyait arriver dans cette voiture, nous appelait « les crapauds »), bleu clair ou vert foncé: les fauteuils pliables, le barbecue, le charbon de bois, le panier bien sûr et surtout la toile rayée jaune et blanche.
On s’entassait tous à l’arrière, mes trois frères et moi, le chien s’installait en dernier et s’allongeait confortablement sur nos quatre paires de genoux… Si l’un de mes frères était absent, il était remplacé par un cousin, un copain ou les grands-parents…
Arrivés sur les lieux, Papa installait le barbecue, chapeau vissé sur la tête, répartissait le charbon de bois, allumait et se préoccupait de faire de belles braises, il pouvait alors poser la grille et posait côte à côte les papillotes, il gardait cependant toujours un peu de place pour faire des tomates provençales qui cuisaient doucement. Pendant ce temps, mes frères et moi sortions le reste, fauteuils de toile, table pliante, panier et la toile rayée jaune et blanche. Maman avait prévu les victuailles incontournables du pic-nique: les chips ou la salade de riz au thon et olives et en dessert caché dans la glacière en polystyrène tapissé de tissu écossais: les glaces faites maison à la fraise ou à l’abricot, en « miko » ou en tranches.
Les parents s’installaient sur les fauteuils et nous sur la toile rayée jaune et blanche… Elle devenait suivant nos âges, la nappe du pique-nique , le matelas de nos siestes ou le drap éloignant les moustiques, le tipi de nos combats d’indiens et de cow-boys, la toile de tente sous laquelle nous jouions aux cartes, ou le auvent nous protégeant du soleil.
Cette toile rayée jaune et blanche a commencé à accompagner nos souvenirs lorsque mon plus jeune frère avait 1 an comme en témoigne cette photo et je me souviens l’avoir vue encore à la maison lors de mes 20 ans, elle avait été plusieurs fois rapiécée mais avait gardé ses couleurs. Elle a voyagé avec nous en Suisse, dans le Jura, en Lorraine, en Bretagne, Nax, Montaigu, Eulmont, Port-Blanc… de quoi dérouler les fils de ma mémoire..
Je ne sais pas ce qu’elle est devenue, peut-être dort-elle cachée au fond d’une valise, attendant de raconter ses souvenirs…

One thought on “T comme la Toile rayée jaune et blanche

  • 23 juin 2005 at 8 h 21 min
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    C’est avec plaisir, émotion, gratitude que j’ai lu cet article qui me donne un tout petit morceau du puzzle de la vie de Denis et de vous tous. Cette toile tendue me fait penser à un rideau de théâtre derrière lequel se cache une vie merveilleuse qui ne demande qu’à être racontée car elle a bel et bien été jouée. Merci Christine.

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